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Richard von Krafft-Ebing

Simple inversion du sens sexuel

Psychopathia Sexualis : III. — Neuro-Psychopathologie générale

Date de mise en ligne : lundi 15 septembre 2008

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Richard von Krafft-Ebing, Études médico-légales : Psychopathia Sexualis. Avec recherche spéciales sur l’inversion sexuelle, Traduit sur la 8e édition allemande par Émile Laurent et Sigismond Csapo, Éd. Georges Carré, Paris, 1895.

Fréquence et importance des symptômes pathologiques. — Tableau des névroses sexuelles. — Irritation du centre d’érection. — Son atrophie. — Arrêts dans le centre d’érection. — Faiblesse et irritabilité du centre. — Les névroses du centre d’éjaculation. — Névroses cérébrales. — Paradoxie ou instinct sexuel hors de la période normale. — Éveil de l’instinct sexuel dans l’enfance. — Renaissance de cet instinct dans la vieillesse. — Aberration sexuelle chez les vieillards expliquée par l’impuissance et la démence. — Anesthésie sexuelle ou manque d’instinct sexuel. — Anesthésie congénitale ; anesthésie acquise. — Hyperesthésie ou exagération morbide de l’instinct. — Causes et particularités de cette anomalie. — Paresthésie du sens sexuel ou perversion de l’instinct sexuel. — Le sadisme. — Essai d’explication du sadisme. — Assassinat par volupté sadique. — Anthropophagie. — Outrages aux cadavres. — Brutalités contre les femmes ; la manie de les faire saigner ou de les fouetter. — La manie de souiller les femmes. — Sadisme symbolique. — Autres actes de violence contre les femmes. — Sadisme sur des animaux. — Sadisme sur n’importe quel objet. — Les fouetteurs d’enfants. — Le sadisme de la femme. — La Penthésilée de Kleist. — Le masochisme. — Nature et symptômes du masochisme. — Désir d’être brutalisé ou humilié dans le but de satisfaire le sens sexuel. — La flagellation passive dans ses rapports avec le masochisme. — La fréquence du masochisme et ses divers modes. — Masochisme symbolique. — Masochisme d’imagination. — Jean-Jacques Rousseau. — Le masochisme chez les romanciers et dans les écrits scientifiques. — Masochisme déguisé. — Les fétichistes du soulier et du pied. — Masochisme déguisé ou actes malpropres commis dans le but de s’humilier et de se procurer une satisfaction sexuelle. — Masochisme chez la femme. — Essai d’explication du masochisme. — La servitude sexuelle. — Masochisme et sadisme. — Le fétichisme ; explication de son origine. — Cas où le fétiche est une partie du corps féminin. — Le fétichisme de la main. — Les difformités comme fétiches. — Le fétichisme des nattes de cheveux ; les coupeurs de nattes. — Le vêtement de la femme comme fétiche. — Amateurs ou voleurs de mouchoirs de femmes. — Les fétichistes du soulier. — Une étoffe comme fétiche. — Les fétichistes de la fourrure, de la soie et du velours. — L’inversion sexuelle. — Comment on contracte cette disposition. — La névrose comme cause de l’inversion sexuelle acquise. — Degrés de la dégénérescence acquise. — Simple inversion du sens sexuel. — Éviration et défémination. — La folie des Scythes. — Les Mujerados. — Les transitions à la métamorphose sexuelle. — Métamorphose sexuelle paranoïque. — L’inversion sexuelle congénitale. — Diverses formes de cette maladie. — Symptômes généraux. — Essai d’explication de cette maladie. — L’hermaphrodisme psychique. — Homosexuels ou uranistes. —Effémination ou viraginité. — Androgynie et gynandrie. — Autres phénomènes de perversion sexuelle chez les individus atteints d’inversion sexuelle. — Diagnostic, pronostic et thérapeutique de l’inversion sexuelle.

Premier degré : Inversion simple du sens sexuel.

Ce degré est atteint quand une personne du même sexe produit sur un individu un effet aphrodisiaque, et que ce dernier éprouve pour l’autre un sentiment sexuel. Mais le caractère et le genre du sentiment restent encore conformes au sexe de l’individu. Il se sent dans un rôle actif ; il considère son penchant pour son propre sexe comme une aberration et cherche éventuellement un remède.

Avec cette amélioration épisodique de la névrose il se peut qu’au début des sentiments sexuels normaux se manifestent et se maintiennent. L’observation suivante nous paraît tout à fait apte à montrer par un exemple frappant cette étape sur la route de la dégérérescence psycho-sexuelle.

Observation 94. — Inversion acquise.

Je suis fonctionnaire ; je suis né, autant que je sais, d’une famille exempte de tares ; mon père est mort d’une maladie aiguë, ma mère vit : elle est assez nerveuse. Une de mes sœurs est devenue depuis quelques années d’une religiosité exagérée.

Quant à moi, je suis de grande taille et j’ai tout à fait le caractère viril dans mon langage, ma démarche et mon maintien. Je n’ai pas eu de maladies, sauf la rougeole ; mais, depuis l’âge de treize ans, j’ai souffert de ce qu’on appelle des maux de tête nerveux.

Ma vie sexuelle a commencé à l’âge de treize ans, en faisant la connaissance d’un garçon un peu plus âgé que moi, quocum alter alterius genitalia tangendo delectabar. À l’âge de quatorze ans, j’eus ma première éjaculation. Amené à l’onanisme par deux de mes camarades d’école, je le pratiquai, tantôt avec eux, tantôt solitairement, mais toujours en me représentant dans mon imagination des êtres du sexe féminin. Mon libido sexualis était très grand ; il en est encore de même aujourd’hui. Plus tard, j’ai essayé d’entrer en relations avec une servante jolie, grande, ayant de fortes mammæ ; id solum assecutus sum, ut me præsente superiorem corporis sui partem enudaret mihique concederet os mammasque osculari, dum ipsa penem meum valde erectum in manum suam recepit eumque trivit. Quamquam violentissime coitum rogavi hoc solum concessit, ut genitalia ejus tangerem.

Devenu étudiant à l’Université, je visitai un lupanar et je réussis le coït sans effort.

Mais un incident est arrivé qui a produit en moi une évolution. Un soir, j’accompagnais un ami qui rentrait chez lui et, comme j’étais un peu gris, je le saisis ad genitalia en plaisantant. Il ne se défendit pas beaucoup ; je montai ensuite avec lui dans sa chambre, nous nous masturbâmes, et nous pratiquâmes assez souvent dans la suite cette masturbation mutuelle ; il y avait même immissio penis in os avec éjaculation. Ce qui est étrange, c’est que je n’étais pas du tout amoureux de ce camarade, mais passionnément épris d’un autre de mes camarades dont l’approche ne m’a jamais produit la moindre excitation sexuelle et, dans mon idée, je ne mettais jamais sa personne en rapport avec des faits sexuels. Mes visites au lupanar, où j’étais un client bien vu, devenaient de plus en plus rares ; je trouvais une compensation chez mon ami et ne désirais plus du tout les rapports sexuels avec les femmes.

Nous ne pratiquions jamais la pédérastie ; nous ne prononcions pas même ce mot. Depuis le commencement de cette liaison avec mon ami, je me suis remis à me masturber davantage ; naturellement l’idée de la femme fut de plus en plus reléguée au second rang ; je ne pensais qu’à des jeunes gens vigoureux avec de gros membres. Je préférais surtout les garçons imberbes de seize à vingt-cinq ans, mais il fallait qu’ils soient jolis et propres. J’étais surtout excité par les jeunes ouvriers en pantalon d’étoffe de manchester ou de drap anglais ; les maçons principalement me produisaient cette impression.

Les personnes de mon monde ne m’excitaient pas du tout ; mais, à l’aspect d’un fils du peuple, vigoureux et énergique, j’avais une émotion sexuelle bien prononcée. Toucher ces pantalons, les ouvrir, saisir le pénis, puis embrasser le garçon, voilà ce qui me paraissait le plus grand bonheur.

Ma sensibilité pour les charmes féminins s’est un peu émoussée, mais, dans les rapports sexuels avec la femme, surtout quand elle a des seins forts, je suis toujours puissant sans avoir besoin de me créer dans mon imagination des scènes excitantes. Je n’ai jamais essayé de séduire à mes vils désirs un jeune ouvrier ou quelqu’un de son monde, et je ne le ferai jamais ; mais j’en ai souvent envie. Quelquefois je fixe dans ma mémoire l’image d’un de ces garçons et je me masturbe chez moi.

Je n’ai aucun goût pour les occupations féminines. Je n’aime pas trop à être dans la société des dames ; la danse m’est désagréable. Je m’intéresse vivement aux beaux arts. Si j’ai parfois un sentiment d’inversion sexuelle, c’est, je crois, en partie une conséquence de ma grande paresse qui m’empêche de me déranger pour entamer une liaison avec une fille ; toujours fréquenter le lupanar, cela répugne à mes sentiments esthétiques. Aussi je retombe toujours dans ce maudit onanisme auquel il m’est bien difficile de renoncer.

Je me suis déjà dit cent fois que, pour avoir des sentiments sexuels tout à fait normaux, il me faudrait avant tout étouffer ma passion presque indomptable pour ce maudit onanisme, aberration si répugnante pour mes sentiments esthétiques. J’ai pris tant et tant de fois la ferme résolution de combattre cette passion de toute la force de ma volonté ! Mais jusqu’ici je n’ai pas réussi. Au lieu de chercher une satisfaction naturelle quand l’instinct génital devenait trop violent chez moi, je préférais me masturber, car je sentais que j’en éprouverais plus de plaisir.

Et cependant l’expérience m’a appris que j’étais toujours puissant avec les filles, sans difficulté et sans avoir recours à des images des parties génitales viriles, sauf une seule fois ou je ne suis pas arrivé à l’éjaculation, parce que la femme — c’était dans un lupanar — manquait absolument de charme. Je ne peux pas me débarrasser de l’idée ni me défendre du grave reproche que je me fais à ce sujet, que l’inversion sexuelle dont sans doute je suis atteint à un certain degré, n’est que la conséquence de mes masturbations excessives, et cela me cause d’autant plus de dépression morale que j’avoue ne guère me sentir la force de renoncer par ma propre volonté à ce vice.

À la suite de mes rapports sexuels avec un condisciple et ami de longue date, rapports qui n’ont commencé que pendant notre séjour à l’Université et après sept ans de relations amicales, le penchant pour les satisfactions anormales du libido s’est renforcé en moi.

Permettez-moi de vous raconter encore un épisode qui m’a préoccupé pendant des mois entiers.

L’été 1882 je fis la connaissance d’un collègue de l’Université, de six ans plus jeune que moi, et qui m’avait été recommandé par plusieurs jeunes gens, à moi et à d’autres personnes de ma connaissance. Bientôt j’éprouvai un intérêt profond pour ce jeune homme qui était très beau, de formes bien proportionnées, de taille svelte et d’aspect bien portant. Après des relations de quelques semaines avec lui, cet intérêt devint un sentiment d’amitié intense et plus tard un amour passionné entremêlé des tourments de la jalousie. Je m’aperçus bientôt que des mouvements sensuels se confondaient avec cette affection. Malgré ma ferme résolution de me contenir vis-à-vis de ce jeune homme que j’estimais à cause de son excellent caractère, pourtant une nuit, après force libations de bière, nous étions dans ma chambre où nous vidions une bouteille de vin en l’honneur de notre amitié sincère et durable ; je succombai à l’envie irrésistible de le presser contre moi, etc., etc.

Le lendemain lorsque je le revis, j’avais tellement honte que je n’osais pas le regarder dans les yeux. J’éprouvais le repentir le plus amer de ma faute et me faisais les plus violents reproches d’avoir ainsi souillé cette amitié qui aurait dû rester pure et noble. Pour lui prouver que je n’avais agi que sous le coup d’une impulsion momentanée, j’insistai auprès de lui pour qu’il fît avec moi un voyage à la fin du semestre. Il y consentit, après quelques hésitations dont les raisons étaient assez claires pour moi. Nous avons alors couché plusieurs nuits dans la même chambre, sans que j’aie jamais fait la moindre tentative pour répéter l’acte de la nuit mémorable. Je voulais lui parler de cet incident, mais je n’en avais pas le courage. Lorsque, le semestre suivant, nous fûmes séparés l’un de l’autre, je ne pus me décider à lui écrire sur cette affaire, et quand, au mois de mars, je lui fis une visite à X…, j’eus la même faiblesse. Et pourtant, j’éprouvais le besoin impérieux de lui expliquer ce point obscur, par un entretien franc et loyal. Au mois d’octobre de la même année, j’étais à X…, et ce n’est qu’alors que je trouvai le courage nécessaire pour une explication sans réserves. J’implorai son pardon, qu’il m’accorda volontiers ; je lui demandai même pourquoi il ne m’avait pas alors opposé une résistance résolue ; il me répondit qu’il m’avait en partie laissé faire par complaisance, que d’autre part, étant ivre, il se trouvait dans un certain état d’apathie. Je lui exposai alors ma situation d’une manière détaillée, je lui donnai aussi à lire la Psychopathia sexualis et lui exprimai le ferme espoir que par ma force de volonté j’arriverais à dompter complètement mon penchant contre nature. Depuis cette explication mes relations avec cet ami sont devenues des plus heureuses et des plus satisfaisantes ; les sentiments amicaux sont de part et d’autre intimes, sincères, et j’espère durables aussi.

Dans le cas où je n’apercevrais pas une amélioration dans mon état, je me déciderais à me soumettre complètement à votre traitement, d’autant plus que, d’après l’étude de votre ouvrage, je crois pouvoir dire que je n’appartiens pas à la catégorie des soi-disant uranistes et qu’une ferme volonté secondée et dirigée par le traitement d’un homme compétent pourrait faire de moi un homme aux sentiments normaux.

Observation 95. — Ilma S… [1], vingt-neuf ans, non mariée, fille de négociant, est issue d’une famille lourdement tarée.

Le père était potator et finit par le suicide, de même que le frère et la sœur de la malade. Une sœur souffre d’hysteria convulsiva. Le grand-père du côté maternel s’est brûlé la cervelle dans un accès de folie. La mère était maladive et est morte paralysée par apoplexie. Elle n’a jamais été gravement malade ; elle est bien douée intellectuellement, romanesque, d’imagination vive et rêveuse. Réglée à dix-huit ans, sans malaises ; les menstruations furent irrégulières. À l’âge de quatorze ans, chlorose et catalepsie par frayeur. Plus tard, hysteria gravis et accès de folie hystérique. À l’âge de dix-huit ans, liaison avec un jeune homme, liaison qui n’en est pas restée aux termes platoniques. Elle répondait avec ardeur et chaleur à l’amour de cet homme. Des allusions faites par la malade indiquent qu’elle était très sensuelle et que, après le départ de son amant, elle s’est livrée à la masturbation. La malade mena ensuite une vie romanesque. Pour pouvoir gagner son pain, elle s’habilla en homme, devint précepteur dans une famille, quitta cette place parce que la maîtresse de la maison, ne connaissant pas son sexe, tomba amoureuse d’elle et la poursuivit de ses assiduités. Elle devint ensuite employé de chemins de fer. En compagnie de ses collègues, elle était obligée, pour cacher son sexe, de fréquenter les bordels et d’écouter des propos malséants. Cela lui répugnait ; elle donna sa démission, se rhabilla en femme, et chercha dorénavant à gagner son pain par des occupations féminines. On l’a arrêtée pour vol et, par suite de crises hystéro-épileptiques, on l’a transportée à l’hôpital.

Là on découvrit chez elle des penchants pour son propre sexe. La malade devint importune par ses poursuites après les gardes-malades féminines et ses camarades d’hôpital.

On prit son inversion sexuelle pour une perversion acquise. La malade a donné à ce sujet d’intéressantes explications qui ont rectifié l’erreur.

On porte sur moi, dit-elle, un jugement erroné, quand on croit qu’en présence du sexe féminin, je me sens homme. Au contraire, dans ma manière de penser et de sentir, je me conduis en femme. J’ai aimé mon cousin comme une femme est capable d’aimer un homme.

Le changement de mes sentiments a pris naissance par le fait qu’à Budapest, déguisée en homme, j’eus l’occasion d’observer mon cousin. Je vis combien il m’avait trompée. Cette constatation m’a causé une grande douleur d’âme. Je savais que jamais je ne serais plus capable d’aimer un homme, car je suis de celles qui n’aiment qu’une fois dans leur vie. Puis, en compagnie de mes collègues de chemin de fer, je fus obligée d’écouter les conversations les plus choquantes et de fréquenter les maisons les plus mal famées. Ayant ainsi pu entrevoir les menées du monde masculin, je conçus une aversion invincible pour les hommes. Mais, comme je suis d’un naturel passionné et que j’éprouve le besoin de m’attacher à une personne aimée et de me donner entièrement, je me sentis de plus en plus attirée vers les femmes et les filles qui m’étaient sympathiques, et surtout vers celles qui brillaient par leurs qualités intellectuelles.

L’inversion sexuelle, évidemment acquise, de cette malade se manifestait souvent d’une manière impétueuse et très sensuelle ; elle a gagné du terrain par la masturbation, une surveillance permanente dans les hôpitaux ayant rendu impossible toute satisfaction sexuelle avec des personnes de son propre sexe. Le caractère et le genre d’occupation sont restés féminins. Elle ne présentait pas les caractères de la virago. D’après les communications que l’auteur vient de recevoir, la malade, après un traitement de deux ans à l’asile, a guéri de sa névrose et de sa perversion sexuelle.

Observation 96. — X…, dix-neuf ans, né d’une mère souffrant d’une maladie de nerfs ; deux sœurs du père et de la mère étaient folles. Le malade, de tempérament nerveux, bien doué, bien développé au physique, de conformation normale, a été, à l’âge de douze ans, amené par son frère aîné à pratiquer l’onanisme mutuel.

Plus tard, le malade persévéra dans ce vice, en le pratiquant solitairement. Depuis trois ans, il lui vint, pendant l’acte de la masturbation, d’étranges fantaisies dans le sens d’une inversion sexuelle.

Il se figure être une femme, par exemple être une ballerine, et faire le coït avec un officier ou un cavalier de cirque. Ces images perverses accompagnent l’acte d’onanisme depuis que le malade est devenu neurasthénique.

Il reconnaît lui-même les dangers de la masturbation, il la combat désespérément, mais toujours et toujours il finit par succomber à son violent penchant.

Si le malade réussit à s’en abstenir pendant quelques jours, il se produit alors chez lui des impulsions normales dans le sens des rapports sexuels avec des femmes ; mais la crainte d’une infection arrête ces impulsions et le pousse de nouveau à la masturbation.

Ce qui est digne d’être remarqué, c’est que les rêves érotiques de ce malheureux n’ont pour sujet que la femme.

Au cours de ces derniers mois, le malade est devenu neurasthénique et hypocondriaque à un degré très avancé. Il craint le tabes.

Je lui conseillai de faire traiter sa neurasthénie, de supprimer la masturbation et d’arriver à la cohabitation aussitôt que sa neurasthénie se serait atténuée.

Observation 97. — X…, trente-cinq ans, célibataire, né d’une mère malade, déprimée au moral. Le frère est hypocondriaque.

Le malade était bien portant, vigoureux, de tempérament vif et sensuel, avait un instinct génital puissant qui s’éveilla de trop bonne heure ; il s’est masturbé étant encore tout petit garçon, a fait le premier coït à l’âge de quatorze ans et, assure-t-il, avec plaisir ; il fut complètement puissant. À l’âge de quinze ans, un homme a essayé de le débaucher et l’a manustupré. X… en éprouva du dégoût et se sauva de cette situation « dégoûtante ». Devenu grand, il fit des excès de coït avec un libido indomptable. En 1880, il devint neurasthénique, souffrit de la faiblesse de ses érections et d’ejaculatio præcox ; il devint en même temps de plus en plus impuissant et cessa d’éprouver du plaisir à l’acte sexuel. À cette époque, il eut, pendant une certaine période, un penchant qui lui était auparavant étranger et qui lui paraît encore aujourd’hui inexplicable, pour les rapports sexuels cum puellis non pubibus XII ad XIII annorum. Son libido s’augmentait à mesure que sa puissance s’affaiblissait.

Peu à peu il conçut un penchant pour les garçons de treize à quatorze ans. Il était poussé à s’approcher d’eux.

Quodsi ei occasio data est, ut tangere posset pueros, qui si placuere, penis vehementer se erexit tum maxime quum crura puerorum tangere potuisset. Abhinc feminas non cupivit. Nonnunquam feminas ad coïtum coegit sed erectio debilis, ejaculatio præmatura erat sine ulla voluptate.

Il n’avait plus d’intérêt que pour les jeunes garçons. Il en rêvait et avait alors des pollutions. À partir de 1882, il eut parfois l’occasion, concumbere cum juvenibus. Il était alors sexuellement très excité et se soulageait par la masturbation.

Ce n’est que par exception qu’il osa, socios concumbentes tangere et masturbationem mutuam adsequi. Il détestait la pédérastie. La plupart du temps il était obligé de satisfaire par la masturbation solitaire ses besoins sexuels. Pendant cet acte, il évoquait le souvenir et l’image de garçons sympathiques. Après les rapports sexuels avec des garçons, il se sentait toujours ragaillardi, frais, mais en même temps moralement déprimé par l’idée d’avoir commis un acte pervers, immoral et encourant des peines. Il fait la constatation très pénible que son penchant détestable était plus puissant que sa volonté.

X… suppose que son amour pour son propre sexe a pour cause ses excès des plaisirs sexuels normaux ; il regrette profondément son état et a demandé, au mois de décembre 1880, à l’occasion d’une consultation, s’il n’y avait pas moyen de le ramener à la sexualité normale, puisqu’il n’a pas d’horror feminæ et qu’il aimerait bien à se marier.
Sauf les symptômes d’une neurasthénie sexuelle et spinale modérée, le sujet, d’ailleurs intelligent et exempt de stigmates de dégénérescence, ne présente aucun symptôme de maladie.

P.-S.

Texte établi par PSYCHANALYSE-PARIS.COM d’après l’ouvrage de Richard von Krafft-Ebing, Études médico-légales : Psychopathia Sexualis. Avec recherche spéciales sur l’inversion sexuelle, Traduit sur la 8e édition allemande par Émile Laurent et Sigismond Csapo, Éd. Georges Carré, Paris, 1895.

Notes

[1Comparez : Experimentelle Studien auf dem Gebiete des Hypnotismus de l’auteur, 3e édition, 1893.

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