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Benjamin BALL

Les Nécrophilies

La folie érotique - Chapitre III : La perversion sexuelle (Section 2)

Date de mise en ligne : samedi 8 novembre 2003

Mots-clés : ,

Benjamin BALL, La folie érotique, Librairie J.-B. Baillère et fils, Paris, 1888.
 Chapitre III : La perversion sexuelle
 Section II : Les Nécrophilies

II. Les Nécrophilies

Le nécrophilisme ou la nécrophilie constitue un degré extrême et l’une des plus remarquables déviations de l’appétit vénérien, et dénote chez les auteurs la plus étrange aberration mentale coïncidant parfois, en apparence, avec la plus saine raison.

Le vieil Hérodote nous raconte comment Périandre, tyran de Corinthe, après avoir fait mourir sa femme Mélissa, eut des rapports sexuels avec le cadavre [1].

Ce nécrophile historique a eu des émules à toutes les époques.

Connus dans l’Antiquité et au Moyen âge sous le nom de lycanthropes, vampires, démoniaques nommés nécrophiles par Guislain, etc., ces malheureux furent la terreur des populations et l’objet des mesures les plus sévères.

On a vu, paraît-il, des prêtres violer les cadavres auprès desquels ils étaient chargés de réciter les dernières prières.

Il y a plusieurs années, M. Baillarger a donné lecture à l’Académie de Médecine d’un rapport sur un cas de nécrophilisme fort intéressant [2].

Il s’agissait d’un sieur X…, âgé de vingt-sept ans, d’un tempérament lymphatique, mais doué néanmoins, d’une très grande force musculaire. Il a présenté dés ses premières années des signes non douteux d’idiotie. À mesure qu’il avançait en âge, l’absence d’intelligence devenait de plus en plus manifeste.

X… ne put jamais apprendre à lire ; il était d’ailleurs violent, indocile, plein de bizarreries. Élevé par les soins de l’administration de l’hospice de Troyes, il fut successivement placé chez plusieurs paysans, mais aucun d’eux ne put le garder. On le ramenait à l’hospice, déclarant ne rien pouvoir obtenir de lui.

Plus tard, X… devient sujet à des accès de manie périodique. Presque tous les mois, il était pendant plusieurs jours d’une violence extrême, injuriant les personnes qui l’entouraient, proférant des menaces de mort et d’incendie. Il fallait alors quelquefois le renfermer dans une cellule et même dans quelques cas le maintenir fixé par la camisole de force.

De temps en temps, il quittait furtivement l’hospice, et après avoir erré plusieurs jours dans la campagne, il revenait exténué de fatigue, les vêtements en lambeaux et couvert de boue. Cependant dans les intervalles de ses accès, X… pouvait se livrer aux plus rudes travaux ; il était infatigable et faisait à lui seul l’ouvrage de plusieurs personnes. Aussi, malgré son état d’imbécillité, trouvait-on de temps en temps des cultivateurs qui consentaient à le prendre.

Cependant, un fait d’une extrême gravité vint mettre fin à ces essais de liberté.

X... se trouvait alors chez un cultivateur du bourg d’Eslissac, lorsqu’en présence de cinq ou six personnes il commit une tentative de viol sur une paysanne. On fut forcé de le réintégrer à l’hospice de Troyes, où bientôt se passèrent les actes monstrueux qu’il nous reste à raconter :

X… trompant la surveillance des gardiens s’introduisait dans la salle des morts, quand il savait que le corps d’une femme venait d’y être déposé, et il se livrait aux plus indignes profanations.

Il se vanta publiquement de ces faits, dont il ne paraissait pas comprendre la gravité. D’abord on ne put y croire ; mais, appelé devant le directeur, X… raconta ce qui se passait manière à lever tous les doutes.

On prit, dès ce moment des mesures pour mettre cet homme dans l’impossibilité de renouveler les profanations qu’on venait de découvrir. Mais cet idiot si privé d’intelligence pour toutes choses déploya, dans ce cas, un instinct de ruse qui le fit triompher de tous les obstacles. Il avait dérobé une clef qui ouvrait la salle des morts et les profanations de cadavres purent ainsi continuer pendant longtemps.

Il fallut enfin reconnaître l’inutilité des mesures employées jusque-là pour prévenir le retour d’actes si odieux et X… fut envoyé à l’asile des aliénés de Saint-Dizier.

Mais il faut franchir un pas de plus, arriver à ceux qui, pour satisfaire leurs passions, vont jusqu’à déterrer les morts et briser leurs cercueils.

En 1848 on constata, à plusieurs reprises au cimetière Montparnasse que tes tombes récemment creusées avaient été profanées. Malgré les précautions qui furent immédiatement prises, ces attentats se renouvelèrent plusieurs fois de suite.

Ce ne fut qu’après un temps assez long qu’on parvint à surprendre le coupable. C’était un sergent, nommé Bertrand, en garnison à Paris, dont la conduite paraissait irréprochable et qui avait d’excellentes notes au régiment.

Cet homme, dont la généalogie démontrait nettement qu’il était un héréditaire, avait tous les quinze jours environ des maux de tête extrêmement violents qui précédaient les crises dans lesquelles se manifestaient ces désirs morbides. Il escaladait alors avec une grande agilité les murs du cimetière et déterrait les femmes récemment ensevelies, pour satisfaire sa passion. Traduit en conseil de guerre, il fut condamné à un an de prison.

On voulait ainsi donner une satisfaction à l’opinion publique en évitant de prononcer l’acquittement, et rendre hommage à l’expertise faite par les aliénistes, qui avaient reconnu que Bertrand était atteint de folie.

On peut rapprocher de ce fait les profanations récemment accomplies au cimetière de Saint-Ouen par un des gardiens, Brau, qui allait jusqu’à déterrer des femmes mortes de la variole pour violer leurs cadavres. Cet homme était marié, et sa femme a pu témoigner de la brutalité de ses habitudes.

Une perversion aussi monstrueuse de l’appétit sexuel ne peut exister que chez des fous, et les nécrophiles sont certainement des aliénés.

Ce sont presque toujours ou des dégénérés ou des congénitaux. Mais certainement ils ont toujours une tare : le malade dont l’observation est rapportée par M. Baillarger en est un type complet, Bertrand n’échappe pas plus à l’hérédité que Brau.

Mais nous abordons maintenant un sujet différent, et nous allons nous occuper d’une perversion sexuelle qui peut coïncider avec un état parfaitement normal de l’intelligence et même avec les facultés les plus brillantes de l’esprit.

Notes

[1Dans son « Introduction à la Psychanalyse », Freud rappelle cette anecdote, et en profite pour donner la symbolique inconsciente du four et de la boulange :
« Que four soit le symbole de la femme et de la matrice, c’est ce qui nous est confirmé par la légende grecque relative à Périandre de Corinthe et à sa femme Melissa. Lorsque, d’après le récit d’Hérodote, le tyran, après avoir par jalousie tué sa femme bien-aimée, adjura son ombre de lui donner de ses nouvelles, la morte révéla sa présence en rappelant à Périandre qu’il avait mis son pain dans un four froid, expression voilée, destinée à désigner un acte qu’aucune autre personne ne pouvait connaître. Dans l’Anthropophyteia, publiée par F.-S. Kraus et qui constitue une mine de renseignements incomparables pour tout ce qui concerne la vie sexuelle des peuples, nous lisons que dans certaines régions de l’Allemagne on dit d’une femme qui vient d’accoucher : son four s’est effondré. La préparation du feu, avec tout ce qui s’y rattache, est pénétrée profondément de symbolisme sexuel. La flamme symbolise toujours l’organe génital de l’homme, et le foyer le giron féminin » (S. Freud, Introduction à la Psychanalyse, Deuxième partie, Le rêve, Chapitre X, Le symbolisme dans le rêve) [Abréactions Associations].

[2Baillarger, cas remarquable de maladie mentale, observation recueillie au dépôt provisoire des aliénés de l’Hôtel-Dieu de Troyes, par le Docteur Bédor. (Bulletin de l’Académie de Médecine, 1857-58, t. XXIII, p. 136).

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