III
NEURO-PSYCHOPATHOLOGIE GÉNÉRALE
Fréquence et importance des symptômes pathologiques. — Tableau des névroses sexuelles. — Irritation du centre d’érection. — Son atrophie. — Arrêts dans le centre d’érection. — Faiblesse et irritabilité du centre. — Les névroses du centre d’éjaculation. — Névroses cérébrales. — Paradoxie ou instinct sexuel hors de la période normale. — Éveil de l’instinct sexuel dans l’enfance. — Renaissance de cet instinct dans la vieillesse. — Aberration sexuelle chez les vieillards expliquée par l’impuissance et la démence. — Anesthésie sexuelle ou manque d’instinct sexuel. — Anesthésie congénitale ; anesthésie acquise. — Hyperesthésie ou exagération morbide de l’instinct. — Causes et particularités de cette anomalie. — Paresthésie du sens sexuel ou perversion de l’instinct sexuel. — Le sadisme. — Essai d’explication du sadisme. — Assassinat par volupté sadique. — Anthropophagie. — Outrages aux cadavres. — Brutalités contre les femmes ; la manie de les faire saigner ou de les fouetter. — La manie de souiller les femmes. — Sadisme symbolique. — Autres actes de violence contre les femmes. — Sadisme sur des animaux. — Sadisme sur n’importe quel objet. — Les fouetteurs d’enfants. — Le sadisme de la femme. — La Penthésilée de Kleist. — Le masochisme. — Nature et symptômes du masochisme. — Désir d’être brutalisé ou humilié dans le but de satisfaire le sens sexuel. — La flagellation passive dans ses rapports avec le masochisme. — La fréquence du masochisme et ses divers modes. — Masochisme symbolique. — Masochisme d’imagination. — Jean-Jacques Rousseau. — Le masochisme chez les romanciers et dans les écrits scientifiques. — Masochisme déguisé. — Les fétichistes du soulier et du pied. — Masochisme déguisé ou actes malpropres commis dans le but de s’humilier et de se procurer une satisfaction sexuelle. — Masochisme chez la femme. — Essai d’explication du masochisme. — La servitude sexuelle. — Masochisme et sadisme. — Le fétichisme ; explication de son origine. — Cas où le fétiche est une partie du corps féminin. — Le fétichisme de la main. — Les difformités comme fétiches. — Le fétichisme des nattes de cheveux ; les coupeurs de nattes. — Le vêtement de la femme comme fétiche. — Amateurs ou voleurs de mouchoirs de femmes. — Les fétichistes du soulier. — Une étoffe comme fétiche. — Les fétichistes de la fourrure, de la soie et du velours. — L’inversion sexuelle. — Comment on contracte cette disposition. — La névrose comme cause de l’inversion sexuelle acquise. — Degrés de la dégénérescence acquise. — Simple inversion du sens sexuel. — Éviration et défémination. — La folie des Scythes. — Les Mujerados. — Les transitions à la métamorphose sexuelle. — Métamorphose sexuelle paranoïque. — L’inversion sexuelle congénitale. — Diverses formes de cette maladie. — Symptômes généraux. — Essai d’explication de cette maladie. — L’hermaphrodisme psychique. — Homosexuels ou uranistes. —Effémination ou viraginité. — Androgynie et gynandrie. — Autres phénomènes de perversion sexuelle chez les individus atteints d’inversion sexuelle. — Diagnostic, pronostic et thérapeutique de l’inversion sexuelle.
Dans les trois cas suivants, il y a également impuissance, mais elle peut être d’origine psychique, la note dominante de la vita sexualis étant ab origine basée sur le penchant sadiste et ses éléments normaux se trouvant atrophiés.
Observation 28 (communiquée par Demme, Buch der Verbrechen, VII, p. 281). — Le coupeur de filles d’Augsbourg, le nommé Bartle, négociant en vins, avait déjà des penchants sexuels à l’âge de quatorze ans, mais une aversion prononcée pour la satisfaction de l’instinct par le coït, aversion qui allait jusqu’au dégoût du sexe féminin. Déjà, à cette époque, il lui vint à l’idée de faire des plaies aux filles et de se procurer par ce moyen une satisfaction sexuelle. Il y renonça cependant faute d’occasions et d’audace.
Il dédaignait la masturbation ; par-ci par-là il avait des pollutions sous l’influence de rêves érotiques avec des filles blessées.
Arrivé à l’âge de dix-neuf ans, il fit, pour la première fois, une blessure à une fille. Hæc faciens sperma ejaculavit, summa libidine affectus. L’impulsion à de pareils actes devint de plus en plus forte. Il ne choisissait que des filles jeunes et jolies et leur demandait auparavant si elles étaient mariées ou non. L’éjaculation et la satisfaction sexuelle ne se produisaient que lorsqu’il s’apercevait qu’il avait réellement blessé la fille. Après l’attentat, il se sentait toujours faible et mal à l’aise ; il avait aussi des remords.
Jusqu’à l’âge de trente-deux ans, il ne blessait les filles qu’en coupant la chair, mais il avait toujours soin de ne pas leur faire de blessures dangereuses. À partir de cette époque et jusqu’à l’âge de trente-six ans, il parvint à dompter son penchant. Ensuite il essaya de se procurer de la jouissance en serrant les filles aux bras ou au cou, mais par ce procédé il n’arrivait qu’à l’érection, jamais à l’éjaculation. Alors il essaya de frapper les filles avec un couteau resté dans sa gaine, mais cela ne produisit pas non plus l’effet voulu. Enfin il donna un coup de couteau pour de bon et eut un plein succès, car il s’imaginait qu’une fille blessée de cette manière perdait plus de sang et ressentait plus de douleur que si on lui avait incisé la peau. À l’âge de trente-sept ans, il fut pris en flagrant délit et arrêté. Dans son logement, on trouva un grand nombre de poignards, de stylets et de couteaux. Il déclara que le seul aspect de ces armes, mais plus encore de les palper, lui avait procuré des sensations voluptueuses et une vive excitation.
En tout, il aurait blessé cinquante filles, s’il faut s’en tenir à ses aveux.
Son extérieur était plutôt agréable. Il vivait dans une situation bien rangée, mais c’était un individu bizarre et qui fuyait la société.
Observation 29. — J. H…, vingt-cinq ans, est venu en 1883 à la consultation pour neurasthénie et hypocondrie très avancées. Le malade avoue s’être masturbé depuis l’âge de quatorze ans ; jusqu’à l’âge de dix-huit ans il en usa moins fréquemment, mais depuis il n’a plus la force de résister à ce penchant. Jusque-là, il n’a jamais pu s’approcher d’une femme, car il était soigneusement surveillé par ses parents qui, à cause de son état maladif, ne le laissaient jamais seul. D’ailleurs, il n’avait pas de désir prononcé pour cette jouissance qui lui était inconnue.
Il arriva, par hasard, qu’un jour, une fille de chambre de sa mère cassa une vitre en lavant les carreaux de la fenêtre. Elle se fit une blessure profonde à la main. Comme il l’aidait à arrêter le sang, il ne put s’empêcher de le sucer, ce qui le mit dans un état de violente excitation érotique allant jusqu’à l’orgasme complet et à l’éjaculation.
À partir de ce moment, il chercha par tous les moyens à se procurer la vue du sang frais de personnes du sexe féminin et autant que possible à en goûter. Il préférait celui des jeunes filles. Il ne reculait devant aucun sacrifice ni aucune dépense d’argent pour se procurer ce plaisir.
Au début, la femme de chambre se mettait à sa disposition et se laissait, selon le désir du jeune homme, piquer au doigt avec une aiguille et même avec une lancette. Mais lorsque la mère l’apprit, elle renvoya la femme de chambre. Maintenant il est obligé d’avoir recours à des mérétrices pour obtenir un équivalent, ce qui lui réussit assez souvent, malgré toutes les difficultés qu’il a à surmonter. Entre temps, il se livre à la masturbation et à la manustupratio per feminam, ce qui ne lui donne jamais une satisfaction complète et ne lui vaut qu’une fatigue et les reproches qu’il se fait intérieurement. À cause de son état nerveux, il fréquentait beaucoup les stations thermales ; il a été deux fois interné dans des établissements spéciaux où il demandait lui-même à entrer. Il usa de l’hydrothérapie, de l’électricité et de cures appropriées sans obtenir un résultat sensible.
Parfois il réussit à corriger sa sensibilité sexuelle anormale et son penchant à l’onanisme par l’emploi des bains de siège froids, du camphre monobromé et des sels de brome. Cependant, quand le malade se sent libre, il revient immédiatement à son ancienne passion et n’épargne ni peine ni argent pour satisfaire son désir sexuel de la façon anormale décrite plus haut.
Observation 30 (communiquée par Albert Moll, de Berlin). — L… T…, vingt et un ans, commerçant dans une ville rhénane, appartient à une famille dans laquelle il y a plusieurs personnes nerveuses et psychopathes. Une de ses sœurs est atteinte d’hystérie et de mélancolie.
Le malade a toujours été d’un caractère très tranquille ; il était même timide. Étant à l’école, il s’isolait souvent de ses camarades, surtout quand ceux-ci parlaient de filles. Il lui semblait toujours choquant de traiter, dans une conversation avec dames, mariées ou non, la question du coucher ou du lever, ou même d’en faire mention.
Dans les premières années de ses études, le malade travaillait bien ; plus tard, il devint paresseux et ne put plus faire de progrès. Le malade vint, le 17 août 1870, consulter le docteur Moll sur les phénomènes anormaux de sa vie sexuelle. Cette démarche lui fut conseillée par un médecin ami, la docteur X…, auquel il avait fait des confidences auparavant.
Le malade fait l’impression d’un homme très timide, farouche. Il avoue sa timidité, surtout en présence d’autres personnes, son manque de confiance en lui-même et d’aplomb. Ce fait a été confirmé par le docteur X…
En ce qui concerne sa vie sexuelle, le malade peut en faire remonter les premières manifestations à l’âge de sept ans. Alors il jouait souvent avec ses parties génitales, et il fut quelquefois puni pour cela. En se masturbant ainsi, il prétend avoir obtenu des érections ; il se figurait toujours qu’il frappait avec des verges une femme sur les nates dénudées jusqu’à ce qu’elle en eût des durillons.
« Ce qui m’excitait surtout, raconte le malade, c’est l’idée que la personne flagellée était une femme belle et hautaine, et que je lui infligeais la correction en présence d’autres personnes, surtout des femmes, pour qu’elle sentît la force de mon pouvoir sur elle. Je cherchai donc de bonne heure à lire des livres où il est question de corrections corporelles, entre autres un ouvrage où il était question des mauvais traitements infligés aux esclaves romains.
« Cependant je n’avais pas d’érections quand les mauvais traitements que je me représentais consistaient en coups donnés sur le dos ou sur les épaules. Tout d’abord je crus que ce genre d’excitation passerait avec le temps, et voilà pourquoi je n’en parlai à personne. »
Le malade, qui s’était onanisé de bonne heure, continua. Au moment de sa masturbation, il évoquait toujours la même image de flagellation. Depuis l’âge de treize ou quatorze ans, le malade avait des éjaculations quand il se masturbait. Decimum septimum annum agens primum feminam adiit coeundi causa neque coitum perficere potuit libidine et erectione deficientibus. Mox autem iterum apud alteram coitum conatus est nullo successu. Tum feminam per vim verberavit. Tantopere erat excitatus ut mulierem dolore clamantem atque lamentantem verberare non desierit. Il ne pensait pas que ce fait pouvait lui attirer des poursuites judiciaires qui, d’ailleurs, n’ont pas eu lieu. Par ce procédé, il obtenait l’érection, l’orgasme et l’éjaculation. Il accomplissait l’acte de la manière suivante : il serrait de ses deux genoux la femme de manière que son pénis touchait le corps de celle-ci, mais sans immissio penis in vaginam, ce qui lui paraissait tout à fait superflu.
Plus tard le malade eut tant de honte de battre des femmes et fut en proie à des idées si noires, qu’il pensa souvent au suicide. Pendant les trois années suivantes, le malade alla encore chez des femmes. Mais jamais il ne leur demanda plus de se laisser battre par lui. Il essayait d’arriver à l’érection en pensant aux coups donnés à la femme ; mais cet artifice n’avait aucun succès, neque membrum a muliere tractatum se erexit. Après avoir fait cet essai et échoué, le malade prit la résolution de se confier à un médecin.
Le malade fournit encore une série d’autres renseignements sur sa vita sexualis. L’anomalie de son instinct sexuel l’avait autant gêné que son intensité. Il se couchait avec des idées sexuelles qui le poursuivaient toute la nuit et revenaient au moment de son réveil le matin. Il n’était jamais à l’abri de la résurrection de ces idées morbides qui l’excitaient, idées auxquelles au début il se livrait avec délectation, mais dont il ne pouvait se débarrasser pour quelque temps que par la masturbation.
À une de mes questions, le malade répond qu’en dehors des coups sur le dos et surtout sur les nates de la femme, les autres violences n’exerçaient aucun charme sur lui. Ligotter la femme, fouler son corps aux pieds, n’avaient pas du charme pour lui. Ce fait est d’autant plus à relever que les coups donnés à la femme ne procurent au patient un plaisir sexuel que parce que ces coups sont « humiliants et déshonorants » pour la femme ; celle-ci doit sentir qu’elle est complètement en son pouvoir. Le malade n’éprouverait aucun charme s’il frappait la femme sur une autre partie du corps que celle dont il a été fait mention, ou s’il lui causait des douleurs d’un autre genre.
Multo minorem ei affert voluptatem si nates suæ a muliere verberantur ; tamen ea res sæpe ejaculationem seminis effecit sed hæc fieri putat erectione deficiente.
Inter verbera autem penem in vaginam immittendo nullum voluptatem se habere ratus qualibet parte corporis femininæ pene tacta semen ejaculat. De même qu’en battant la femme le charme pour lui consistait dans l’humiliation de celle-ci, il se sentait de même excité sexuellement par le fait contraire, c’est-à-dire par l’idée d’être humilié lui-même par des coups et de se trouver entièrement livré à la puissance de la femme. Pourtant tout autre genre d’humiliation que des coups reçus sur les fesses, ne pouvait l’exciter. Il lui répugnait de se laisser ligoter et fouler aux pieds par une femme.
Les rêves du malade en tant qu’ils étaient de nature érotique, se mouvaient toujours dans le même ordre d’idées que ses penchants sexuels à l’état de veille. Dans ses rêves il avait souvent des pollutions. Les idées sexuelles perverties ont-elles apparu d’abord dans les rêves ou à l’état de veille ? Le patient n’a pu donner sur ce sujet de renseignements précis, bien que le souvenir de la première excitation remonte à l’âge de sept ans. Cependant il croit que ces idées lui sont venues à l’état de veille. Dans ses rêves, le malade battait souvent des personnes du sexe mâle, ce qui lui causait aussi des pollutions. À l’état de veille, l’idée de battre des hommes ne lui causait que peu d’excitation. Le corps nu de l’homme n’a pour lui aucun charme, tandis qu’il se sent nettement attiré par le corps nu d’une femme, bien que son libido ne trouve de satisfaction que lorsque les faits sus-mentionnés ont lieu, et bien qu’il n’éprouve aucun désir du coït in vaginam.
Le traitement du malade eut essentiellement pour but d’amener chez lui un coït normal, autant que possible avec penchant normal, car il était à supposer que si l’on réussissait à rendre normale sa vie sexuelle, il perdrait aussi son caractère farouche et craintif qui le gêne beaucoup. Dans le traitement que j’ai employé (Dr Moll), pendant trois mois et demi, j’ai usé des trois moyens suivants :
– 1º J’ai défendu expressément au malade qui désire vivement être guéri, de s’abandonner avec plaisir à ses idées perverses. Il va de soi que je ne lui donnai pas le conseil absurde de ne plus penser du tout à la flagellation. Un pareil conseil ne pourrait être suivi par le malade, car ces idées lui viennent indépendamment de sa volonté et apparaissent rien qu’en lisant par hasard le mot « frapper ». Ce que je lui défendis expressément, c’était d’évoquer lui-même de pareilles idées et de s’y abandonner volontairement. Au contraire, je lui recommandai de faire tout pour concentrer ses idées sur un autre sujet.
– 2º J’ai permis, j’ai même recommandé au malade, puisqu’il s’intéresse aux femmes nues, de se représenter dans son imagination des femmes dans cet état. Je lui fis cette recommandation bien qu’il prétende que ce n’est pas au point de vue sexuel que les femmes nues l’intéressent.
– 3º J’ai essayé par l’hypnose, qui était très difficile à obtenir, et par la suggestion, d’aider le malade dans cette nouvelle voie. Pour le moment, toute tentative de coït lui a été interdite afin d’éviter qu’il se décourage par un échec éventuel.
Au bout de deux mois et demi, ce traitement eut pour résultat que, d’après les affirmations du patient du moins, les idées perverses venaient plus rarement et étaient de plus en plus reléguées au second rang ; l’image des femmes nues lui donnait des érections qui devenaient de plus en plus fréquentes et qui l’amenaient souvent à se masturber avec l’idée du coït sans qu’il s’y mêle l’idée de battre une femme. Pendant son sommeil, il n’avait que rarement des rêves érotiques ; ceux-ci avaient comme sujet, tantôt le coït normal, tantôt les coups donnés aux femmes. Deux mois et demi après le début de mon traitement, j’ai conseillé au malade d’essayer le coït. Il l’a fait depuis quatre fois. Je lui recommandai de choisir toujours une femme qui lui fût sympathique, et j’essayai, avant le coït, d’augmenter son excitation sexuelle par de la tinctura cantharidum.
Les quatre essais — le dernier a eu lieu le 29 novembre 1800 — ont donné les résultats suivants. La première fois, la femme a dû faire de longues manipulations sur le pénis pour qu’il y eût érection ; alors l’immissio in vaginam réussit et il y eut éjaculation avec orgasme. Pendant toute la durée de l’acte, il ne lui vint point l’idée qu’il battait la femme ou qu’il en était battu : la femme l’excitait suffisamment pour qu’il pût pratiquer le coït. Au second essai, le résultat fut meilleur et plus prompt. Les manipulations de la femme sur les parties génitales ne furent nécessaires que dans une très faible mesure. Au troisième essai, le coït ne réussit qu’après que le malade eut, pendant longtemps, pensé à la flagellation et se fût mis, par ce moyen, en érection ; mais il n’en vint point à des voies de fait. Au quatrième essai, le coït réussit sans aucune évocation d’idées de frapper et sans aucune manipulation de la femme sur le pénis.
Il est évident que, jusqu’en ce moment, on ne peut considérer comme guéri le malade dont il est ici question. De ce que le malade a pu quelquefois pratiquer le coït d’une manière à peu près normale ou tout à fait normale, cela ne veut pas dire qu’il en sera toujours capable à l’avenir, d’autant plus que l’idée de battre lui cause toujours un grand plaisir, bien que cette idée lui vienne maintenant plus rarement qu’autrefois. Pourtant il y a des probabilités pour que le penchant anormal qui, à l’heure actuelle, s’est considérablement atténué, diminue dans l’avenir ou disparaisse peut-être complètement.
Ce cas, observé avec beaucoup de soin, est extrêmement intéressant à bien des points de vue. Il montre nettement une des raisons cachées du sadisme, la tendance à réduire la femme à une sujétion sans limites, tendance qui est entrée dans ce cas dans la conscience de l’individu. C’est d’autant plus curieux que l’individu en question était d’un caractère timide, et, dans ses autres rapports sociaux, d’allures excessivement modestes et mêmes craintives. Ce cas nous montre aussi clairement qu’il peut exister un libido puissant et entraînant l’individu malgré tous les obstacles, tandis qu’en même temps il y a absence de tout désir du coït, la note dominante du sentiment étant tombée sur la sphère des idées sadistes et voluptueusement cruelles. Le cas en question contient en même temps quelques faibles éléments de masochisme.
Il n’est pas rare d’ailleurs que des hommes aux penchants pervertis payent des prostituées pour qu’elles se laissent flageller et même blesser jusqu’au sang.
Les ouvrages qui s’occupent de la prostitution contiennent des renseignements sur ce sujet, entre autres la volume de Coffignon : La Corruption à Paris.