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Dr A. Marie

Un cas de fétichisme des bas (sadi-fétichisme)

Archives d’anthropologie criminelle (1907)

Date de mise en ligne : mercredi 14 mars 2007

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Dr A. Marie, « Sadi-fétichisme et zoophilie sadique » (Première Observation), Archives d’anthropologie criminelle de criminologie et de psychologie normale et pathologique, t. XXII, Éd. Masson et Cie, Paris, 1907, pp. 317-324.

SADl-FÉTlCHlSME ET ZOOPHILIE SADIQUE
par le Dr A. MARIE
Médecin en Chef des asiles de la Seine

Dans un précédent article, j’ai étudié [1] un certain nombre de cas de perversions sexuelles par insuffisance génitale. J’ai, depuis, présenté deux de ces malades à la Société de psychologie de Paris : l’un, présenté par M. le Dr Viollet et moi, était un cas de fétichisme des bas chez un dégénéré délirant, l’autre était un sadi-fétichiste zoophile. Il m’a paru intéressant de rapporter ici, comme suite à mon précédent article, la relation complète de ces cas qui sont l’un et l’autre, jusqu’à un certain point encore, en rapport avec quelque insuffisance sexuelle psychique ou physique, ainsi qu’on le verra : ces cas prennent quelque intérêt d’actualité avec le crime récent de Soleillant, qui semble se rattacher à la sphère de l’érotomanie sadique.

OBSERVATION I

Dans le premier cas, il s’agissait d’un dégénéré héréditaire nommé D… Son père est mort à cinquante et un ans d’une tuberculose rapide. C’était un homme doux, assez intelligent, mais doué d’une volonté très faible et d’un manque de suite dans les idées très notable. Il s’occupait de son commerce de marchand de vin, mais uniquement au titre de son meilleur client. II buvait surtout de l’absinthe. Son père était mort à quatre-vingt-onze ans, sa mère à quatre-vingt-huit ans. Ils étaient tous deux intelligents. Le père de D… a eu une soeur imbécile qui n’a jamais pu apprendre à lire ni à écrire.

La mère de D… est vivante. Elle a eu la danse de Saint-Guy étant jeune. elle est demeurée très nerveuse, ayant des moments d’excitation. Bizarre dans les actes de sa vie, elle avait souvent des absences au milieu des conversations. Cet état, elle le tenait de son père qui avait fréquemment des accès de tædium vitæ. Sa mère, d’intelligence normale, est tombée en enfance les dernières années de sa vie et est morte à quatre-vingt-neuf ans. Six frères et soeurs, dont deux sont morts jeunes et dont deux sont bizarres, originaux.

Les collatéraux de D… sont normaux ; toutefois deux de ses soeurs sont très nerveuses.

Laissant de côté, pour le moment, son anomalie sexuelle, nous voyons dans ses antécédents personnels les preuves de sa débilité congénitale. Au physique, il est bien bâti, ne présente aucune anomalie de structure, il n’a jamais eu de maladies graves. Au moral, il a toujours été bizarre, capricieux, passant rapidement de la gaieté folle à la tristesse morne, sans cause d’ailleurs. Son éducation n’a pas été négligée par ses parents, mais il en a peu profité. Il a toutefois une belle écriture, s’est adonné à l’étude de la botanique, mais de façon à n’en retenir que la dénomination latine des plantes, ignorant de leur signification et sans souci des idées générales et des lois de cette science. Quoiqu’il soit resté au collège jusqu’à dix-huit ans, il donne l’impression d’un esprit sinon inculte et vide, du moins incomplet et extrêmement inégal. À partir de seize ans, sa mémoire a beaucoup baissé, en même temps qu’on constate un accroissement de l’inégalité d’humeur, des crises de fureur sans raison, des craintes hypocondriaques.

Tous ces symptômes paraissent dus à une neurasthénie, accompagnée d’onanisme, auquel il s’adonnait depuis l’enfance avec une grande fréquence. Cette neurasthénie entraînait de plus en plus avec elle l’inégalité d’humeur, la mobilité des idées, des travaux sitôt pris sitôt quittés, l’incapacité de tout acte raisonnable.

Bientôt, vers dix-huit ans, il s’y mêla des idées confuses de persécution avec fausses interprétations, illusions, peut-être même hallucinations. Ces idées de persécution sont de la nature de celles que l’on est accoutumé à rencontrer chez les débiles ; sa soeur lui faisait certains signes pour se moquer de lui, on lui en voulait, etc.

Survient alors la période du service militaire. Il s’engage à dix-huit ans. Il fait un très mauvais service. II est probable que ses chefs n’ont rien compris à son état de débilité mentale. Il était toujours puni pour insoumission. Rentré chez sa mère, à l’âge de vingt-deux ans, il se montre aussi faible d’esprit qu’auparavant, incapable de tout travail suivi, avec cela vaniteux et attachant une grande importance aux vétilles dont il s’occupait. De plus, il se met à boire et cette fâcheuse adjonction le précipite désormais plus vite du côté de la déchéance intellectuelle et des délires. Il commence à avoir des phobies ; il déteste les femmes et le bruit des voitures et présente des idées délirantes ; sa soeur envoie des voitures passer à côté de lui ; il riposte en lui envoyant des lettres d’injures, menaçant de la dynamiter, etc. Il a aussi des hallucinations de l’ouïe : toutes les femmes qui passent auprès de lui l’appellent Ernest ; de l’odorat et du goût : on met quelque chose dans son manger, aussi lave-t-il la viande cuite qu’on lui apporte à table et fait-il ensuite sa cuisine lui-même. Autres réactions : il bouche sa fenêtre avec son édredon pour ne pas entendre les voitures, ne pas voir les femmes. Il refuse de recevoir qui que ce soit, etc. Des violences envers sa soeur, suite de ses préoccupations délirantes, forcent sa famille à réclamer son internement.

Son premier internement va du 12 janvier 1893 au 14 septembre de la même année. II aurait, pendant ce temps, présenté des symptômes de dépression mélancolique, avec idées hypocondriaques et de persécution, hallucinations. Rentré dans sa famille, il ne tarde pas à présenter de nouveau des symptômes d’aliénation : craintes d’empoisonnement, hallucinations de l’ouïe, des femmes l’insultent, accès de fureur. Des voisins se plaignent au Commissaire qui menace d’un internement d’office si un placement volontaire n’est pas fait par sa famille. Ce nouvel internement se prolonge pendant environ deux ans. Il sort de nouveau, est rendu à sa famille, mais ne tarde pas à présenter une recrudescence de son même délire : craintes d’empoisonnement, voix de femmes qui l’insultaient. Des crises d’agitation finissent par obliger sa famille à l’interner de nouveau (2 février 1904). Il entre encore à l’asile où il se calme et travaille bientôt à faire des copies, mais il est toujours halluciné : « Les femmes internées à Villejuif le poursuivent aussi avec une rumeur féminine, qu’il peut imiter en faisant cain, cain, et à laquelle il répond en faisant des espèces de jappements. Ces femmes (qu’il n’a pas vues), des belles femmes se sont embellies en se sentant les pieds et, par ce même moyen, elles ont fait venir le beau temps, qu’il déteste parce qu’il ne peut pas devenir beau lui-même en sentant des pieds ou des bas de femmes, accessoires qu’il ne peut se procurer à l’asile. »

Nous touchons en ce moment à son anomalie sexuelle, qui nous intéresse davantage, et à laquelle nous avons trouvé une origine, comme l’indique Binet, dans des impressions d’enfance.

Ce débile a ressenti très jeune ce que Krafft Ebbing appelle le libido sexualis. Avec sa faiblesse congénitale d’esprit, son hyperesthésie sexuelle aurait pu le pousser à n’importe quelle perversion : inversion sexuelle, sadisme, masochisme, etc…, au gré des impressions d’enfance, des conseils et des exemples. Son hyperesthésie se manifestait déjà dans son enfance par la singulière impression que lui produisaient les caresses de sa soeur. Il se frottait le ventre sur les bras des personnes qui le portaient. Un peu plus tard, il a des érections à la vue des rougeurs fugaces qu’il croit produites sur les joues des petits enfants par les baisers de leurs nourrices. Enfin il eut un jour une érection avec sensation particulièrement voluptueuse à la vue d’une fillette au bain qui se sentait le pied. Ce spectacle resta particulièrement ancré dans sa mémoire.

Entraîné par des camarades, il se masturba, soit seul, soit alter alterius à partir de l’âge de douze ans. Il parait aussi avoir, avec eux, usé de la fellatio. À cette époque, comme il le dit lui-même dans une lettre que l’on trouvera plus loin, il avait des érections à la vue de « suçons sur la joue de petits enfants » ou de « femmes ou filles se déchaussant et se décrottant les pieds ».

Un peu plus tard, il fut amené à tenter le coït par une bonne, puis une voisine peu sauvages. À son grand regret et découragement, il lui fut impossible de parvenir à l’érection et à l’intromissio in vaginam. De telles tentatives furent, plus tard, faites sans succès, mais son attention attirée depuis l’incident de son enfance vers les pieds des femmes l’amenèrent à pratiquer sur elles la succion du petit doigt de pied, manoeuvre qui aboutissait à une érection avec sensation voluptueuse. Il essaya vainement de parachever ce résultat par le coït : l’intromissio était impossible, parce que l’érection cessait aussitôt qu’elle était tentée. Il avait d’ailleurs parfois des éjaculations spontanées pendant qu’il pratiquait la succion.

Sa timidité de débile et la honte qu’il éprouvait de son impuissance l’empêchèrent de se livrer souvent à ces manifestations érotiques, et il se rabattit sur un fétiche analogue mais plus impersonnel, sur lequel il peut se satisfaire sans honte, et c’est ainsi que les bas de femmes remplacèrent ou, pour la plupart du temps, suppléèrent à la succion de leurs doigts de pieds.

Il commença à accumuler, à thésauriser les bas de femmes. Il en prit à sa soeur. Il en acheta ou en vola aux femmes qu’il allait voir, sans les coïter, parfois sans leur sucer le petit doigt de pied. Plus tard, il en acheta à des brocanteurs, mais pour qu’ils produisissent leur effet, il fallait qu’ils aient été portés et non lavés. Des bas neufs ou lavés le laissaient indifférent. Il préférait aussi de beaucoup les bas de luxe, en soie, en fil, ajourés, brodés ; les bas noirs lui plaisaient surtout. De plus, il préférait qu’ils aient été portés par des femmes jolies, et pourtant nous avons vu qu’en les achetant chez le brocanteur il faisait en quelque sorte abstraction de la personne, négligeant le contenu pour s’assouvir du seul contenant, et s’éloignait encore davantage de son fétiche primitif le petit doigt de pied.

Nous avons aussi cherché s’il y avait un côté homo-sexuel à son fétichisme ; il avait, étant jeune, désiré les pieds de ses petits camarades, mais n’osait leur avouer cette bizarrerie. Actuellement, les bas d’hommes ne le tentent pas, ce qui tient peut-être à ce que les hommes portent rarement des bas, et il ne désire pas davantage sucer des doigts de pieds masculins.

Cependant, privé de femmes par l’internement, il lui est arrivé de chercher à pratiquer des succions à la peau du cou, des épaules ou des bras d’autres malades plus jeunes avec lesquels il se rencontrait au lavabo le matin. Une fois, l’été, au jardin, il s’y est livré sur un jeune imbécile qui avait quitté sa veste et retroussé ses manches en raison de la chaleur ; le chef jardinier l’a surpris et consigné pour cela.

Les bas qu’il a pu accumuler chez lui, lui servaient à se masturber. Il se couchait, en mettait sous son oreiller, les reniflait, avait des érections et se soulageait par l’onanisme en éjaculant dans ces bas. Il conservait de grandes quantités de ces bas. Il se mettait en colère quand on voulait les lui prendre, il en était jaloux, ne permettait pas qu’on les lavât et les brûlait quand ils étaient trop maculés.

Étant dans l’Asile, il a trouvé moyen de s’en faire venir du dehors et qu’il portait enroulés autour de son corps.

À son fétichisme se mêlent actuellement des idées délirantes : il s’imagine qu’en suçant et reniflant ainsi les pieds et les bas, il soustrait de leur beauté aux femmes ou aux jeunes gens et en fait son profit lui-même. Les femmes s’embellissent en sentant leurs pieds, et ainsi lui nuisent, puisqu’il ne peut s’embellir en pratiquant lui-même ces reniflements. C’est par dérision qu’elles font entendre des rumeurs féminines, pour se moquer de lui, de sa tristesse, de sa laideur qu’il ne peut conjurer en sentant des pieds, etc.

Ajoutons que ce délire est mal bâti, comme tous les délires des dégénérés. Les explications sont saugrenues, le raisonnement est grotesque. Mais en dehors de son délire, qui parait par période seulement, et surtout par les belles journées de soleil, il arrive à convenir de la folie de ses idées délirantes et à espérer leur guérison.

On s’en rendra compte par la lettre qu’il nous a écrite et qui achève d’éclairer notre récit.

Comme adjonction délirante à son aberration sexuelle, nous citerons encore le fait suivant : le malade est privé, à l’asile, de tout fétiche, le plus souvent. Il supplée à cette absence en achetant des éditions de journaux comme le Musée du Nu, où, sous prétexte d’art, sont présentées des photographies de filles de lupanars, complètement nues, sans même le maillot réglementaire. Pour augmenter son excitation sensuelle, D… imagine à ces femmes ses vices personnels (suçons, reniflement des pieds), les injurie pour la passion avec laquelle elles s’y livrent, et plaint bruyamment les victimes qu’elles font. L’idée délirante est très nettement indiquée : vampirisme de la beauté des victimes au moyen de ces suçons et de ces reniflements. Il écrit ses accusations et ses réflexions morales en marge des gravures : nous avons produit les plus nettes de ces illustrations annotées :

(Tableau n° 2) : « En voici deux autres viles salopes qu’ont de même que celles de la page 8 attiré chez elles deux autres enfants de 8 à 9 ans et leur ont couvert le corps de nombreux suçons sur toutes les parties. Ces pauvres petits en ont pleuré toutes leurs larmes, ses pauvres petits s’en sont allés honteux et désolés.

« Quelles dépravées, quelle charognerie et dire qu’on laisse vivre de pareils monstres. C’est horrible.

« 2 autres gougnoues infâmes. »

(Tableau n°7) : « 3 viles salopes qui se sentent les pieds, et suceuses de gosses. »

(Tableau n° 8) : « En voici une autre pareille à celle de la page 12.

« Même pieuvre, même sangsue qui a fait des suçons sur les joues de 10 gosses différents.

« Plus elle a une fille de 11 ans quelle exerçait aux mêmes vices qu’elle.

« C’est honteux, c’est abominable cela de pareilles horreurs. »

(Tableau n° 12) : « En voici une qui a attiré un enfant de 12 ans chez elle et lui a fait plus de 100 suçons sur toutes les parties du corps ainsi qu’aux joues.

« Jugez quelle pieuvre, quelle sale sangsue.

« Aussi le pauvre gosse s’est-il en allé la figure couverte de marques rouges comme le feu et violettes de même que le corps caché par ses habits et vidé comme un verre à bière.

« C’est horrible, quelle cochonne, quelle pieuvre abjecte, c’est monstrueux. »

(Tableau n° 13) : « En voici une autre qui a sucé plus de 120 braquemars aux hommes, quelle suceuse de bittes.

« Aussi regardez-moi ses lèvres sensuelles et épaisses du sang et du sperme qu’elle leur a retiré, elle en est repue, la garce. »

Ce malade avait été repris à l’essai par sa famille qui l’avait placé une première fois chez des religieuses dans un pensionnat de l’Ouest ; là, il fut congédié parce qu’il avait volé les bas des religieuses.

Revenu à l’asile, il était porteur d’une collection de cartes postales représentant des enfants nus. Sur ces figures, le malade avait fait des entailles aux parties charnues et donné des coups d’épingle ou de pointes de crayon. Il avait aussi une curieuse composition à la main ayant trait à la question des pieds et des bas de femmes, comme on le peut voir.

Repris par les siens et placé dans une colonies de vieillards, il y a dérobé des bas de septuagénaires, puis s’est fait réintégrer pour avoir assailli deux enfants de quatre et six ans, sur la figure desquels il s’était livré à ses suçons et morsures habituels, croyant, dit-il, aspirer à son profit la santé et la jeunesse de ces enfants.

On le voit, il y a un sadisme naissant avec homosexualité combinée, s’ajoutant au fétichisme initial.

« Monsieur le Docteur,

« Lorsque j’étais plus jeune, c’est-à-dire depuis l’âge de 12 ans, j’ai toujours été porté aux voluptés sensuelles.

« Ayant le sang fort et doué d’une bonne constitution étant enfant, je me rappellerai toujours avoir vu des enfants s’amuser entre eux ; ainsi lorsque j’avais un petit camarade du même âge que moi et de même nature porté à des excès vénériens, nous nous masturbions quelquefois, et nous n’avons pas été les seuls, car il s’en est trouvé d’autres que nous dans le même cas heureusement, ce qui compensait. Mais n’empêche que lorsque nous nous faisions des suçons sur le visage l’un et l’autre et lorsque nous cherchions à éjaculer en se fourgonnant, nous éprouvions une jouissance extrême. Depuis ce temps, lorsque je voyais des filles embrassant leurs petits frères, leur faire des marques sur leurs joues ; soit ce qu’on appelle véritablement des suçons, ou encore que des jeunes mères en embrassant trop fort leurs enfants, leur marquaient les joues lorsque, dis-je je voyais cela de mes propres yeux, mon sang éprouvait je ne sais quoi dans toute ma personne ; j’éprouvai une envie et une ardeur irrésistible d’être embrassé et caressé de même ; j’aurais donné je ne sais quoi pour être à la place de ses enfants, car moi aussi j’ai beaucoup aimé les caresses et les baisers ; je ne saurais trop vous expliquer, Mr le Docteur, ce que j’éprouvai à la vue de tout cela ; je sentais sans pouvoir y résister ma vergue se redresser, et lorsque je me couchai, sitôt ma bougie éteinte, j’avais toutes ces choses à l’imagination, je me les représentais de mémoire, et il fallait que bon gré, mal gré, j’éjacule de ma vergue le trop plein du sperme qui me gênait.

« C’est précisément de là que l’onanisme m’est venu. Par les lèvres rouges et écarlates des filles qui avaient mangé les gosses de baisers, ensuite lorsque je surprenais dans un endroit quelconque, soit une femme, soit une jeune fille, se déchaussant et se décrottant les pieds au bord de l’eau pendant l’été, j’en étais tout stupéfait et je ressentais la même impression dans mon sang tel que je vous l’ai énoncée auparavant. J’avais donc cela à la pensée les nuits suivantes, et mon envie d’onanisme me reprenait sans que je puisse y résister.

« Car combien de ces cas que j’ai vus dans ma vie, rien que de voir une jambe bien faite et un pied de femme bien formé ne m’a-t-il pas tenté et donné des idées érotiques. À moins que je m’abstienne de prendre des boissons excitantes, ainsi par exemple, en ne buvant pas d’alcools, ni de vin pur, ni de nourriture trop capiteuse ; lorsque je voyais par hasard des choses de ce genre, je veux parler des vices que je vous ai cités plus haut, bien entendu ; eh bien, lorsque je suivais un régime sévère, toutes ces choses voluptueuses n’avaient aucune prise sur moi ; mais, si malheureusement, je me reprenais à boire et à trop manger, quelques moments après, ma vergue se redressait, et vers la nuit suivante (puisque ça ne me prenait que la nuit), étant couché, ,je me retournai sur le ventre et je déchargeais dans mes draps, sans que je puisse m’en empêcher. Vous en conclurez, Mr le Docteur, que c’est la force de la nature et qu’elle y fait pour beaucoup. Car malgré tout, je ne connais pas beaucoup de personnes de sexe masculin, étant forts de sang et de bonne constitution, résister à leurs passions, surtout lorsque la nature chez eux les domine et entraîne à leurs passions érotiques et à leurs vices qu’ils ne peuvent refaire. Je ne vois pas par quels moyens, à moins qu’on leur procure un hypnotique quelconque., soit haschisch, soit opium, soit sulfonal ou bromidia, de telle à telle dose capable d’entraîner le sommeil, et non seulement cela, mais aussi pour éloigner les pensées voluptueuses qui pourraient leur renaître en se couchant, c’est-à-dire pouvant leur revenir l’esprit ; mais comme on ne m’a jamais rien donné de tout cela, ma guérison en est donc restée tardive.

« Rien que l’odeur des petits doigts de pieds de la femme, surtout quand cette femme était jeune et jolie, me procurait des jouissances extrêmes, et me donnait une impression de volupté si grande dans toute ma personne qu’il m’était impossible d’y résister et qu’il fallut que je me procure, bon gré, mal gré, des bas portés par une connaissance ou par une autre, à seule fin de pouvoir passer ma jouissance avec. Je n’étais heureux que lorsque je les avais, ces bas, parce que je me figurais qu’avec, je prendrai la ressemblance de la femme qui les avait portés, étant envieux et jaloux de sa beauté. Je ne regretterai toute ma vie qu’une chose, c’est de n’avoir pas été femme, car aurai-je été probablement plus heureux que je ne suis. Et peut-être toutes ces sortes d’idées-là ne m’auraient elles pas gagné. En définitive, j’ai espoir que tout cela passera avec le temps, et qu’en somme je penserai à des choses plus sérieuses qu’à toutes ces sortes de chimères absurdes-là.

« Je ne vois rien autre à vous dire là-dessus. si ce n’est que vous receviez l’assurance de votre très humble et respectueux serviteur. »

Voir en ligne : Observation II : Un cas de zoophilie sadique

P.-S.

Texte établi par PSYCHANALYSE-PARIS.COM d’après l’article du Dr A. Marie, « Sadi-fétichisme et zoophilie sadique » (Première Observation), Archives d’anthropologie criminelle de criminologie et de psychologie normale et pathologique, t. XXII, Éd. Masson et Cie, Paris, 1907, pp. 317-324.

Notes

[1Perversions par insuffisance sexuelle, Dr Marie et Pelletier (Arch. d’Anthr. criminelle, 16 avril 1906).

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