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Éditorial

Psychanalyse en ligne

Quand l’ordinateur remplace le divan !

Date de mise en ligne : samedi 17 avril 2004

Auteur : Jean-Pierre BÈGUE

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L’image traditionnelle du psychanalyste parisien installé dans un immeuble haussmannien de la rive gauche et pratiquant l’écoute au chevet de son patient allongé sur le divan risque d’être sérieusement bouleversée par l’arrivée de l’analyse en ligne. Exit le divan, exit la présence physique de l’analyste, place à l’ordinateur.

Actuellement quelques psychanalystes novateurs confortablement installés devant leur ordinateur proposent déjà des analyses en utilisant des caméras numériques (webcams) pour des séances en direct avec leurs patients internautes qu’ils peuvent voir et entendre grâce à la transmission par haut débit (ADSL). Le rendez-vous a lieu au jour et heure fixés sur l’aire de rencontre de Yahoo ou de Messenger pour une séance dont la confidentialité est tout autant protégée que derrière les portes capitonnées d’un bureau.

Une fois le contact établi sur le net et les webcams mises en marche, la séance commence, patient et analyste se disent bonjour en se voyant, le patient reste sous le regard de son analyste par le biais de sa caméra tandis que l’analyste interrompt la télétransmission de la sienne afin que le patient ne le voit pas comme c’est le cas dans la situation classique du divan.

Pendant les 45 minutes que dure la séance, l’analyste écoute son analysant dont les paroles lui parviennent par ses écouteurs, le micro dont il dispose lui donne la possibilité d’intervenir quand il le juge opportun tout comme il le ferait dans son cabinet. À la fin de la séance, l’analyste rebranche sa caméra et redevient visible pour son patient, il échange quelques mots avec lui avant de lui dire au revoir.

Ce nouveau mode de prise en charge rendu possible par le net présente de nombreux avantages : l’absence de déplacement constitue l’un de ces avantages surtout en région parisienne où les temps de transport dépassent généralement l’heure dans des conditions difficiles génératrices de fatigue et de stress. Annie nous dit toute sa satisfaction : « je peux faire ma séance chez moi, tranquillement installée dans un fauteuil face à mon ordinateur. Et puis plus de perte de temps, plus besoin de trouver une place pour se garer, plus de stress pour ne pas arriver en retard à la séance après une journée de travail. Quel bonheur ! Pour moi c’est la formule idéale... »

Ne plus avoir à se déplacer 3 fois par semaine en transport en commun ou en voiture a aussi un impact financier non négligeable lorsque l’on sait qu’une analyse dure en moyenne de 3 à 5 ans. D’autre part, la mise en place de plages horaires tardives (20 h à 23 h) est particulièrement bien adaptée aux personnes qui travaillent et rentrent tard chez elles. Le patient est également plus à l’aise dans son milieu familier, il est plus détendu, il se sent plus en sécurité, l’ordinateur sert de médiateur entre lui et l’analyste, le côté ludique du maniement de l’appareil joue un rôle de facilitateur dans la démarche et l’échange.

Il y a également une présence minimale de l’analyste, juste son image dans un coin de l’écran en début et en fin de séance et sa voix, le patient reçoit donc moins d’informations sur lui et il ne peut rien déduire sur son intimité car il n’a pas accès à son environnement familial et familier (appartement, bureau, mobilier, odeurs, conversations, autres patients), il va donc construire ce qu’il imagine à partir de son vécu infantile plus intensément et beaucoup plus rapidement que dans la cure traditionnelle.

La sensation d’être regardé et jugé que craignent beaucoup de patients est beaucoup moins forte voire même absente alors que la présence réelle de l’analyste augmente pour certaines personnes les sentiments de culpabilité ou de honte pour des traumatismes dont ils ne sont pas responsables mais victimes. Situation dont témoigne Sandrine : « À plusieurs reprises j’ai pris des rendez-vous avec des psys mais je n’ai jamais pu y aller, j’ai tellement honte de ce qui m’est arrivé qu’il est impensable pour moi d’en parler, par contre en ligne je peux le dire sans éprouver de malaise. J’avais un oncle qui me faisait très peur avec sa petite moustache et ses yeux noirs sévères, il me faisait des attouchements pendant que ma tante était en course. J’ai honte d’avoir fait ça, je me sens affreusement coupable et j’ai mal aujourd’hui lorsque je pense au sexe. Il y a des moments où je débloque complètement. Dans l’analyse en ligne je peux évoquer tous ces problèmes avec facilité mais je ne les ai pas encore résolus, c’est vraiment très dur. »

Internet permet aussi de choisir son analyste en ayant beaucoup plus de renseignements le concernant que dans la démarche habituelle en consultant son site personnel ou un annuaire professionnel : lieu d’exercice, qualifications, champ de compétences, biographie, publications et souvent photo. Voici ce que dit Pierre à ce sujet : « Je voudrais insister sur le sérieux du “cyberpsy” car on met souvent en cause le sérieux ou la compétence de l’analyste sur Internet, je pense qu’il n’y a pas plus de risques qu’avec un psy en cabinet. Je dirais même que j’avais plus de renseignements qu’avec un psy en ville. Sur son site, j’ai pu voir la liste de ses diplômes, ses articles et livres ainsi que son parcours professionnel. J’ai apprécié cette transparence car je n’aurais probablement pas osé demander tous ces renseignements à un analyste en ville de peur qu’il imagine une mise en cause de sa compétence. »

Autre avantage on ne se trouve plus limité à son quartier, à sa ville, ni tributaire d’un intermédiaire susceptible de donner l’adresse d’un collègue ami ou de la même obédience. La confidentialité est dans un certain nombre de cas plus grande que chez un praticien en ville ou dans un centre de soins ; il n’y a pas le risque de rencontrer une personne connue dans la salle d’attente ou d’être le sujet de conversations informelles au sein d’une équipe soignante. Internet rend l’analyse accessible à des personnes qui habitent des régions isolées, à des personnes handicapées ou à des malades dont la mobilité se trouve réduite. Enfin, il devient possible de continuer son analyse même si on déménage à l’autre bout de la France ou si on s’installe à l’étranger, a contrario des français installés à l’étranger peuvent faire une analyse depuis leur résidence, c’est le cas de Marie : « Installée depuis 2 ans dans un petit village à 45 kms d’Amsterdam, je vis une situation de couple très difficile avec mon compagnon hollandais. Je m’exprime en hollandais pour les choses courantes mais je ne peux pas raconter mes problèmes dans cette langue. J’ai aussi un autre problème : mon obésité, j’ai honte de mon corps, je pèse 95 kg et je ne peux supporter le regard des autres dans la rue ; je reste des semaines sans sortir avec pour seule distraction le PC branché en permanence. Alors quand une amie canadienne rencontrée sur le net m’a parlé d’un analyste en ligne j’ai immédiatement pris contact. »

Le lien avec l’analyste peut aussi être maintenu entre 2 séances ; si le patient a un rêve dont il veut faire part, une angoisse, un questionnement, il peut très bien envoyer un courriel à son analyste et celui-ci lui répond en toute simplicité le jour même, ce qui contribue à l’instauration d’un très grande confiance.

Sur le plan théorique, il n’y a pas de différence entre l’analyse en ligne et l’analyse traditionnelle, ce sont bien les mêmes principes : la démarche est clairement identifiée, il y a un cadre, une règle et la dimension de l’inconscient. Le cadre, c’est le rendez-vous sur Internet à jour et heure précis, la fréquence hebdomadaire et la durée de la séance. La règle fondamentale est la même que dans la cure classique : le patient est invité à dire tout ce qui lui vient à l’esprit spontanément même s’il s’agit de choses immorales ou grotesques, il est aussi invité à raconter ses rêves qui constituent, comme l’a écrit Freud, la voie royale pour saisir et comprendre certaines manifestations de l’inconscient.

L’inconscient est donc bien au premier plan puisqu’il s’agit de retrouver le désir refoulé à l’origine du symptôme ou du conflit intra-psychique dont il est la cause. Le transfert sur l’analyste, c’est-à-dire la répétition et la mise à jour de comportements et d’émotions infantiles liés aux parents, se met en place comme dans la situation classique du divan ainsi que l’apparition des résistances, pour ne pas voir ou admettre certains faits ou sentiments gênants pour la conscience et l’image de soi. Kareen étudiante en psycho en a fait l’expérience : « le transfert sur la personne de l’analyste est bien présent ; j’admire beaucoup mon analyste (comme j’admirai mon père) et je me surprends à lui dire des choses incroyables, que je l’aime, que je veux me marier avec lui alors que nous avons 37 ans de différence d’âge ! Je suis sidérée, jamais je n’aurais pu imaginer avoir autant aimé mon père et haï ma mère ! Des souvenirs anciens remontent à la surface, parfois je pleure mais quelle différence entre pleurer sur le divan en regardant le mur d’en face ou pleurer devant mon écran puisque de toute façon “il” est là, derrière l’écran, bien présent et à l’écoute. »

Le contre transfert de l’analyste est lui aussi sollicité en réponse au transfert affectif du patient sur sa personne, il se doit alors de contrôler les sentiments et les émotions qu’il éprouve pour ne pas compromettre le bon déroulement de la thérapie.

Comme dans la cure classique, après avoir revécu et analysé, entre autres, le transfert et les résistances, il est possible au patient de réinvestir le réel en faisant des projets pour l’avenir, signe incontestable de son désinvestissement progressif de la situation psychanalytique et la fin proche de celle-ci.

Quant au paiement, il est de plus en plus sécurisé et s’effectue en ligne par le biais d’une carte bancaire à chaque séance ou par chèque pour un forfait mensuel payable d’avance.

L’évolution de la technique, le désir de vivre avec leur temps de quelques praticiens ont rendu inéluctable la pratique de l’analyse sur Internet. Cette pratique est possible à la condition de la croire possible et de se mettre en situation de recherche tout comme l’ont fait à leur époque des analystes célèbres comme Freud et Lacan. L’analyse en ligne sera l’objet de nombreuses critiques voire de rejet de la part de nombreux professionnels qui y verront une atteinte intolérable à l’orthodoxie mais de tout temps la nouveauté a induit de telles attitudes.

L’analyse en ligne ne convient pas à tous - ne serait-ce que parce qu’elle suppose un matériel et une appropriation technique qui peuvent être lourds pour certains - elle ne prétend pas non plus se substituer à l’analyse classique qui se pratique en cabinet, elle n’a que le mérite d’exister, d’être là pour certaines personnes internautes qui trouvent dans son utilisation l’aide qui leur convient. N’est-ce pas l’essentiel ?

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