« De son côté, Fethi Benslama revient sur l’un des grands poncifs européocentristes qui consiste à penser que l’islam est un pur système holiste, étranger à la question du sujet. C’est confondre “individualisme” et “individuation”, “idéologie du moi” et “processus de subjectivation” ! En arabe, deux termes peuvent renvoyer au sujet : “mawdhû’” et “’abd”. Le premier désigne les notions de substance, de substrat. Le second désigne certes “celui qui se soumet” mais d’abord “l’adorant” ; puis celui qui fait un effort, qui nie ou refuse ; puis encore, celui qui se repent ; enfin celui qui considère une chose ou une personne comme précieuse. Ainsi, nous voyons, nous dit Fethi Benslama, “par-delà la richesse sémantique du ’abd” apparaître la “coexistence des contraires” : “se mettre au service d’une cause et simultanément se révolter, accepter une charge et refuser, affirmer et nier. Nous sommes proches en cela de la signification de sujet en français, qui recèle la double dimension de la passivité et de l’activité. Le sujet en arabe est le lieu de la contradiction”.
L’occasion alors pour Fethi Benslama de rappeler la définition du sujet selon le philosophe Jurjânî (XVe siècle) : le sujet est d’abord celui “qui rompt la relation d’amour à soi-même” » (Cynthia Fleury, L’Humanité.fr).