« Rivé sur cet autre qui rassemble en lui, nom, situation, lieu, physique et le sujet est hypnotisé par l’objet, c’est tout pour l’autre ; il se fait objet du désir de l’Autre. Il ne sait plus qui il est, où il est, c’est la folie la plus commune, l’état amoureux.
Au cours de l’analyse, l’analysant peut être amené à faire des rencontres de fortes intensité avec des partenaires qui condense une telle somme de traits, de signifiants de l’histoire infantile que cela peut faire exploser tous les repères : il est vrillé, décentré de sa trajectoire, décentré de son désir, parfois au point de se perdre lui-même devant cette rencontre avec ces signifiants qui font surgir devant lui le réel de son histoire. La rencontre avec l’autre et ce qui transite avec lui convoque le sujet au seuil du traumatisme de son histoire : il est, poussé, malgré lui, à devoir répéter quelque chose de l’histoire parentale par exemple, sans pouvoir empêcher la répétition. Ce qui se déchaîne dans ce moment de réel, c’est la pulsion, c’est le corps : le corps c’est la passion…
Cette répétition de l’histoire, qui téléguide le sujet, malgré lui, ne permet pas au sujet de s’inscrire dans son histoire, au contraire, il ne fait que répéter l’histoire, celle de ses parents, qui sont les premiers objets qu’il a rencontrés et qui ont forgé son rapport au désir, trace qui suit un tracé déjà effectué, qui tourne donc en rond. Alors que l’enjeu de l’analyse est que le sujet puisse sortir de la trame de son histoire infantile afin de pouvoir tracer lui-même sa propre trajectoire.
C’est les coupures produites par l’analyste sur le discours mais aussi progressivement par l’analysant lui-même qui va permettre que sa parole s’acère, devienne tranchante, une parole qui acte et ainsi puisse faire coupure sur le cercle de la répétition. Répétition qui pourra s’interrompre permettant au sujet de choisir son destin, en connaissance de cause, en pouvant décider et non plus en ne s’apercevant pas que jusqu’alors, il ne faisait que répéter l’histoire sans le savoir, inconscient des signifiants auxquels il était aliéné.
Reconnaître que l’on est manquant, reconnaître que ce que l’on recherche en l’autre, c’est ce dont on manque voilà le travail de subjectivation que va permettre la cure analytique : désir de reconnaissance-reconnaissance du désir, du manque. » (Anne Carpentier, Le fantasme).